Diagnostic

Le paludisme grave se développant à partir du paludisme simple, son diagnostic est similaire à celui du paludisme simple avec la présence de signes de danger en plus.

Comme indiqué dans le Guide de Prise en Charge du Paludisme Grave de l’OMS, l’élément le plus important du diagnostic clinique du paludisme est un indice de suspicion élevé.

La microscopie est l’examen de référence :

· Lorsque l’examen microscopique est impossible, il faut utiliser un test diagnostique rapide (TDR).

En l’absence d’outils diagnostiques, lorsqu’un diagnostic de paludisme grave est basé sur une suspicion clinique, un traitement antipaludique doit être administré immédiatement au patient, en attendant la vérification des autres causes possibles.

Il est important de surveiller la parasitémie au minimum toutes les 12 heures pendant les 2–3 premiers jours pour évaluer la réponse du parasite au traitement antipaludique, particulièrement en Asie du Sud-Est où on assiste à l’émergence de résistances à l’artémisinine et aux médicaments associés.

Un examen parasitologique positif ne résout pas le problème du diagnostic, particulièrement dans les zones de transmission élevée, où la parasitémie asymptomatique est fréquente et ne joue parfois aucun rôle en présence d’autres maladies graves.

Tropical Medicine & International Health - Special edition: Severe Malaria

Ne pas oublier:

  • La possibilité d’une exposition dans des zones d’endémie (voyage ou résidence), ou dans des zones non endémiques (« paludisme d’aéroport »)
  • La possibilité d’un paludisme induit (à la faveur d’une transfusion, d’une greffe ou de l’utilisation d’aiguilles contaminées)
  • La possibilité de maladies caractérisées par des symptômes similaires à ceux du paludisme, fréquentes dans les zones d’endémie palustre
  • Chez l’enfant, les convulsions peuvent être dues au paludisme ou à une autre maladie fébrile

Signes de danger

Étant donné l’évolution rapide et potentiellement mortelle du paludisme grave, tout patient gravement malade ou potentiellement atteint de paludisme grave doit recevoir une prise en charge symptomatique et un traitement antipaludique par voie parentérale. Lorsque le paludisme grave est suspecté, le traitement doit être instauré sans attendre le résultat des tests diagnostiques. Les signes de danger potentiellement présents chez les patients atteints de paludisme grave sont :

  • Altération de la conscience ou coma
  • Prostration (faiblesse généralisée empêchant le patient de s’asseoir, de se tenir debout, ou de marcher sans assistance)
  • Multiple convulsions : plus de deux épisodes en 24 h
  • Respiration profonde et détresse respiratoire (typique de l’acidose)
  • Œdème pulmonaire aigu et syndrome de détresse respiratoire aiguë
  • Collapsus circulatoire ou état de choc
  • Tension artérielle systolique < 80 mmHg chez l’adulte et < 50 mmHg chez l’enfant
  • Insuffisance rénale aiguë
  • Jaunisse clinique plus signes de dysfonctionnement d’organes vitaux
  • Saignements anormaux


À noter qu’un patient peut présenter un seul de ces signes, ou plus fréquemment plusieurs en même temps.

Microscopie

Photo: WHO

Généralement, plus la densité parasitaire dans le sang périphérique est élevée, plus le risque qu’une forme grave du paludisme soit présente ou se développe est élevé, surtout chez les patients « non immunisés ». Néanmoins, un paludisme grave peut se développer chez un patient présentant une parasitémie périphérique très faible.

Dans les formes les plus sévères de paludisme à P. falciparum, les stades de trophozoïtes matures et de schizontes peuvent être observés au microscope sur goutte épaisse.

Causes d’un frottis sanguin négatif dans le paludisme grave :

  • Traitement médicamenteux récent, particulièrement avec un traitement à base d’artémisinine
  • Erreur d’examen du frottis sanguin – qualité des lames, durée de l’examen, expertise du technicien réalisant l’examen
  • Utilisation exclusive du frottis en couche mince au détriment de la goutte épaisse
  • Identification de parasites autres que falciparum, entraînant l’absence de recherche de P. falciparum

Test diagnostique rapide (TDR)

Photo: Anne Jennings

Les TDR sont basés sur la recherche de différents antigènes produits par le parasite.

Ces tests ne sont pas quantitatifs, et la corrélation entre taux d’antigènes et parasitémie n’étant pas totalement comprise, ils ne fournissent aucune information sur la densité parasitaire, qui est un paramètre important pour le suivi des patients traités pour un paludisme grave.

Comparaison entre les TDR utilisant différents antigènes :

Tests basés sur la recherche de la protéine HRP2 du Plasmodium

  • Ne détectent que P. falciparum
  • Possèdent la plus grande sensibilité
  • L’antigène HRP2 persiste souvent plus de 6 semaines après l’élimination des parasites, entraînant alors des faux positifs
  • À cause de cette persistance de l’antigène, ces tests ne peuvent pas être utilisés pour le suivi de la réponse au traitement

 

  • Tests basés sur la recherche de la lactate déshydrogénase du Plasmodium (pLDH)

  • Capablent de détecter les différentes espèces de Plasmodium
  • L’antigène persiste peu de temps après l’élimination des parasites (50% sont encore positifs 2 jours après l’élimination des parasites,et de façon rare pendant jusqu’à deux semaines)
  • À cause de cette persistance de l’antigène, ce test n’est pas recommandé pour le suivi de la réponse au traitement

 

Absence de la protéine HRP2

La sensibilité des TDR basés sur la détection de HRP2 est parfois réduite lorsque les parasites expriment peu ou pas du tout l’antigène cible, entraînant alors des faux négatifs.

Des rapports émanant de plusieurs pays en Amérique du Sud et en Afrique ont confirmé l’identification de parasites P. falciparum porteurs d’une délétion des gènes codant pour les protéines PfHRP2 et PfHRP3, et qui par conséquent n’expriment pas PfHRP2 et/ou PfHRP3.

Une résistance doit être suspectée lorsque:

  • Un résultat négatif est obtenu sur la ligne HRP2 avec au moins deux TDR du paludisme de qualité garantie ; ET
  • Un résultat positif est obtenu sur la ligne Pf-pLDH ou pan- pLDH si un TDR combiné est utilisé ; ET
  • La présence de P. falciparum est confirmée au microscope par deux techniciens qualifiés


Mesures à prendre en cas de suspicion de résistance :

  • D’autres TDR doivent être utilisés
  • Les décisions de prise en charge des cas doivent être révisées
  • Une nouvelle formation sur les algorithmes et les TDR doit être dispensée


Mesures à prendre en cas de suspicion de résultats faux négatifs :

  • Rechercher une éventuelle absence des protéines PfHRP2/3
  • Toute suspicion de délétion des gènes codant pour PfHRP2/3 doit être déclarée au PNLP et à l’OMS
  • Déterminer la prévalence dans le pays touché et dans les pays voisins
  • Les échantillons bien conservés peuvent être utiles pour cartographier les populations de parasites porteurs de délétions des gènes codant pour HRP2/HRP3