La Cote d'Ivoire
Charge du paludisme
Le paludisme est endémique en Côte d’Ivoire et toute la population est exposée à la maladie. La transmission a lieu tout au long de l’année, avec un pic d’incidence d’avril à juillet.[1] Le pays fait partie des dix pays ayant les taux les plus élevés de cas de paludisme et de décès – en 2020, il représentait 3,1 % des cas et des décès mondiaux, 2,5 % des décès mondiaux et 6,5 % des cas de paludisme en Afrique de l’Ouest. Les avancées réalisées dans la prévention et la lutte contre le paludisme stagnent ces dernières années, le nombre de cas estimés ayant augmenté de 10,4 % entre 2017 et 2020 (passant de 260 à 287 cas pour 1 000 habitants). Toutefois, le nombre de décès liés au paludisme a diminué de 17,5 % au cours de la même période (passant de 0,73 à 0,6 pour 1 000 habitants). [2]
La stratégie nationale de prévention du paludisme pendant la grossesse prévoit la fourniture de moustiquaires imprégnées d’insecticide (MII) lors de la première consultation prénatale et un traitement préventif intermittent pour les femmes enceintes (TPI) dans les zones d’endémie palustre à partir de l’âge gestationnel de treize semaines, pour un minimum de trois doses.[1]
De 98 à 99 % des cas de paludisme en Côte d'Ivoire sont attribuables au Plasmodium falciparum. Les principaux vecteurs sont Anopheles gambiae s.s., An. coluzzii et An. funestus s.s. Le niveau de résistance du principal vecteur, An. gambiae s.s., aux insecticides utilisés pour imprégner les moustiquaires est important dans tout le pays et varie de 39 à 95 % pour la perméthrine, 75 à 100 % pour la deltaméthrine, et 50 à 100 % pour l'alpha-cyperméthrine dans les zones d'étude.[1]
Prise en charge des cas de paludisme grave
Le Programme national de lutte contre le paludisme (PNLP) en Côte d’Ivoire a été créé en 1996. Le Plan stratégique national de lutte contre le paludisme 2021-2025 (PSNLP) a été adopté en 2020. Les principaux objectifs du PSNLP 2021-2025 sont de réduire l’incidence du paludisme et la mortalité liée au paludisme de 75 % d’ici 2025 par rapport aux données de référence de 2015.[1]
Interventions de lutte contre le paludisme
Interventions de lutte contre le paludisme
Prise en charge des cas
La microscopie est utilisée pour confirmer le diagnostic de paludisme dans les secteurs publics et privés à but non lucratif (confessionnels) de tous les hôpitaux de référence de région et de district. Des tests de diagnostic rapide (TDR) servent à confirmer le diagnostic de paludisme dans les centres de santé et au niveau communautaire, ou dans tous les établissements de santé qui n’ont pas accès à la microscopie[1].
Le traitement de première intention contre le paludisme grave est l’artésunate par voie intraveineuse (IV) ou intramusculaire (IM) ; le traitement de première intention pour le paludisme grave pendant la grossesse est la quinine IV. Dans les établissements de santé périphériques, il est recommandé de traiter les formes graves, avant le transfert du patient, par de l’artésunate IM ou artéméther IM. Pour les agents de santé communautaire, l’artésunate rectal (50 mg) est préconisé pour le traitement pré-transfert chez les enfants de moins de cinq ans présentant la forme grave de la maladie[3].
Il n’y a pas de frais pour les TDR ou les combinaisons thérapeutiques à base d’artémisinine (CTA) dans les établissements de santé publics et privés à but non lucratif pour les enfants de moins de cinq ans et les femmes enceintes[2]. Le diagnostic et le traitement d’urgence (y compris pour le paludisme grave) sont gratuits pour les patients de tous âges[2]. Pour les enfants plus âgés et les adultes, tous les TDR et les CTA sont fournis gratuitement dans les établissements de santé publique[2]. Les TDR et les CTA devraient être fournis gratuitement dans des établissements privés à but non lucratif pour les enfants de moins de cinq ans et les femmes enceintes, ce qui n’est pas toujours le cas.[2]
Moustiquaires imprégnées d’insecticide (MII)
Il n'existe pas de données récentes sur la distribution de MII à la population. En 2016, 51 % de la population a déclaré avoir dormi sous une moustiquaire la nuit précédente. Selon la même enquête, 60 % des enfants de moins de cinq ans et 53 % des femmes enceintes dormaient sous une moustiquaire.[1] Une nouvelle enquête démographique et de santé (EDS) est actuellement en cours.[1] Une campagne de distribution massive est prévue pour 2024.[1]
Le paludisme chez la femme enceinte
La prévention du paludisme pendant la grossesse est une intervention clé du PSNLP 2021-2025. Les principaux objectifs énoncés dans le Plan sont qu’au moins 80 % des femmes enceintes dorment sous moustiquaires imprégnées d’insecticide d’ici 2025 et qu’au moins 80 % des femmes enceintes reçoivent au moins trois doses de sulfadoxine-pyriméthamine (SP) au cours de leur dernière grossesse d’ici 2025.
Le PSNLP pour la période 2021-2025 tente de s’aligner sur les orientations de l’OMS revues en 2016 concernant le traitement préventif intermittent pendant la grossesse (TPIg). La première dose de TPI est administrée à seize semaines de grossesse dans le cadre du nombre recommandé au niveau national de consultations prénatales, qui est de quatre. Il est recommandé d’administrer au moins trois doses ultérieures de SP aux femmes enceintes à quatre semaines d’intervalle ; elles devront être directement observées par le personnel du centre de santé. Des moustiquaires imprégnées d’insecticide doivent être fournies aux femmes lors de la première consultation prénatale, et une prise en charge rapide et adaptée de la maladie a lieu tout au long de la grossesse.
La Côte d’Ivoire a connu une amélioration globale des couvertures TPIg (TPIg1, TPIg2 et TPIg3) ces dernières années. La couverture TPIg2 est passée de 59 % en 2017 à 69 % en 2020. Bien que l’élargissement du TPIg3 chez les femmes enceintes ait été constant au cours des dernières années – 23 % en 2016, 36 % en 2017, 40 % en 2018, 45 % en 2019 et 47 % en 2020 – la couverture TPIg3 reste inférieure à l’objectif national de 80 % de femmes enceintes. Aucune des régions sanitaires n’a atteint cet objectif en 2018.
Chimioprévention du paludisme saisonnier
Actuellement, le PNLP ne fournit pas de chimioprévention du paludisme saisonnier (CPS). En Côte d'Ivoire, cependant, le PNLP considère la CPS comme une stratégie prometteuse de prévention du paludisme chez les enfants de moins de cinq ans et souhaite l'adopter dans les districts éligibles. Par conséquent, en avril 2021, le PNLP et son « Groupe Scientifique d'Appui » ont effectué une analyse des données de morbidité de 2019 pour identifier les districts potentiellement éligibles pour la CPS, sur base des directives actuelles de l'OMS. Le groupe a conclu que des informations supplémentaires sont nécessaires et prévoit de poursuivre l'évaluation.
Établissements de soins de santé
La Côte d'Ivoire était auparavant divisée en 20 régions sanitaires et 86 districts sanitaires. Depuis 2020, le pays est réorganisé en une nouvelle structure administrative, composée de 33 régions sanitaires et de 113 districts sanitaires. [1] En Côte d’Ivoire, une proportion importante de la population se fait soigner dans le secteur privé.
Selon le Rapport annuel sur la situation sanitaire (RASS), le taux d'utilisation des services de santé du secteur public était de 47 % en 2018. La même observation (48 %) a été rapportée en 2017. On constate qu'environ 53 % des personnes possiblement atteintes du paludisme recherchent des soins en dehors des établissements publics. Ce pourcentage comprend les personnes qui recherchent des soins/conseils auprès de la communauté, des établissements de santé privés, des pharmacies et des guérisseurs traditionnels, ainsi que celles qui ne recherchent pas de soins du tout. Selon l'enquête en grappes à indicateurs multiples (MICS) de 2016, 13,5 % des enfants de moins de cinq ans atteints de fièvre se sont présentés dans des établissements privés pour obtenir des soins, tandis que 38,5 % n'ont pas sollicité de soins du tout[1].
Bien que les directives nationales précisant la prise en charge correcte des cas de paludisme soient distribuées dans tout le pays, on ignore quels sont les médicaments antipaludiques les plus courants dans le secteur privé.[1]
Défis à relever pour lutter contre le paludisme simple et grave
- Bien que le paludisme soit la principale raison des consultations dans les établissements de santé, la demande immédiate de soins pour les enfants reste tardive. Seuls 63 % environ des enfants de moins de cinq ans atteints de fièvre sont présentés dans un établissement de santé ou à un agent de santé communautaire comme premier recours dans les 24 heures[2].
- Les prestataires peuvent utiliser par défaut l’ancienne stratégie de traitement de la fièvre présumée imputable au paludisme même en l’absence de test diagnostic positif avéré[2].
- Parmi les femmes enceintes ayant reçu de la sulfadoxine et de la pyriméthamine ailleurs que dans un centre de santé, 75,4 % ont déclaré avoir payé pour le médicament, contre 24,3 % pour les femmes qui avaient reçu leur dose auprès d’un centre de santé[2].
- La chaîne d’approvisionnement de la Côte d’Ivoire est confrontée à des défis majeurs. La réforme de la chaîne d’approvisionnement en 2014 a considérablement amélioré le stockage et la distribution des produits de base du Magasin médical central au niveau des districts. Au niveau des districts, toutefois, la distribution des produits de base aux établissements de santé continue de poser problème.
Profil épidémiologique de la Côte d’Ivoire
Admissions et décès dus au paludisme grave en Côte d’Ivoire
Politiques et pratiques en matière de paludisme grave
Directives nationales relatives au traitement |
|
Recommandation |
Traitement |
Fort |
Artésunate IV/IM |
Recommandation |
Grossesse |
Fort |
Quinine IV |
Recommandation |
Pré-transfert |
Établissements de santé périphériques |
Artésunate IM ou Artéméther IM |
Niveau communautaire |
Artésunate rectal |
Grossesse |
|
Recommandation |
Protection |
TPIp |
Sulfadoxine/pyriméthamine (3 doses) |